lundi 13 mai 2013

Mali - Pistes pour la sortie de crise



Les partenaires du Mali se réunissent mardi 15 mai 2013 à Bruxelles pour réfléchir avec le gouvernement malien et des représentants de sa société civile aux pistes de sortie de la crise qui secoue le pays depuis plus d’un an maintenant. Cette réunion est un moment déterminant pour la définition d’une stratégie commune permettant à l’ensemble du pays de renouer avec la paix, la démocratie et le développement.  

Pour IIED et IRAM, un certain nombre de questions-clés ne devront pas être oubliées au cours de ces réflexions.

I - Le rétablissement de la confiance


Le Mali dispose d’un capital social  qui a fait sa force depuis des décennies et lui a permis de passer bien des crises. Aujourd’hui, ce capital est fortement entamé. Le Mali souffre d’un déficit de confiance entre les populations du nord et du sud, entre les différentes communautés du nord et entre l’Etat et les populations du nord. Un climat de confiance doit s’établir pour permettre une paix durable. Ce dernier pourra s'établir par le biais d’un dialogue qui associerait toutes les communautés, et de rencontres intercommunautaires aptes à concrétiser le processus de paix et à amorcer la réflexion sur les questions de développement. Il est important d’appuyer le gouvernement malien dans ce processus qui en plus de la réconciliation et de la paix devra également se baser sur un dialogue effectif permettant aux maliens d’aborder dans un esprit de vérité toutes les questions qui les unissent mais aussi celles qui les divisent.

La tenue des élections législatives et présidentielles, fondamentales pour le rétablissement du processus démocratique est indispensable. Mais pour que celles-ci puissent véritablement rétablir la confiance et non augmenter la méfiance et le désintérêt pour la chose politique, elles doivent se tenir dans des délais et des conditions qui permettent à toutes les communautés d’y participer effectivement.

II - Le bilan et le renouvellement du cadre institutionnel


Malgré la crise actuelle, le Mali n’est pas dépourvu d’institutions. Il existe des institutions en place qu’il est nécessaire de renforcer pour rendre leur fonctionnement effectif au regard des défis à relever. La décentralisation semble constituer, à condition d’être renouvelée et approfondie, un cadre institutionnel adapté à l’expression des initiatives de développement et à la mise en œuvre d’actions publiques répondant aux attentes et aux besoins des citoyens. Cependant, cela suppose, de faire un bilan critique de la décentralisation telle qu’elle a été mise en œuvre jusqu’ici. Il s’agira de revoir  sa capacité à garantir l’équité dans la répartition des services publics, l’accompagnement du développement économique et la gestion des conflits.

III - Une gouvernance de l’Aide à repenser  


Il est probable que des montants importants soient dégagés suite à la réunion de Bruxelles pour aider le Mali à relever les défis de la paix et du développement. Il faut cependant garder en mémoire que malgré des succès indéniables,  les actions de développement au Nord en particulier  se caractérisent par un bilan médiocre. Des sommes importantes ont été dépensées sans que des évolutions notables soient impulsées pour l’amélioration de la condition des populations. Les processus de développement doivent nécessairement être pensés différemment et une nouvelle gouvernance de l’aide doit prendre racine. Les flux d’aide doivent être adaptés aux problématiques actuelles tout en s’articulant avec les politiques nationales et les institutions en place. Pour assurer l’utilisation effective de ces flux au profit des populations, des modes de contrôle par la société civile doivent être envisagés. 

IV - La mise en œuvre d’une démarche visant à définir des actions de développement mieux adaptées


Il est souhaitable d’engager, dès que les conditions de sécurité le permettront, un processus inclusif de dialogue et de concertation autour des actions de développement économique et social au Sud comme au Nord. En plus des appuis aux cultures irriguées, il est indispensable de donner un accent significatif au Nord à l’appui à la sécurisation de l’élevage mobile. L’élevage est une ressource économique majeure sans laquelle les différentes communautés du Nord ne sauraient assurer leur développement. Par ailleurs la sécurisation de cet élevage est un élément important pour le maintien des relations sociales entre les communautés et la gestion concertée des ressources naturelles et du foncier.

Une partie des réfugiés déplacés dans les pays voisins, notamment au Burkina Faso, sont actuellement en train de perdre leur bétail. Il faut dès à présent assurer le maintien de leurs sources de revenus notamment en garantissant la survie du bétail programme d’urgence. Permettre à ces groupes de ne pas perdre entièrement leur capital est indispensable sous peine de les condamner à une paupérisation brutale et persistante. L’enjeu est d’importance : sans ressources, vivant leur situation comme une injustice, les populations notamment les jeunes risquent de venir renforcer les rangs des extrémistes et mettre en danger la paix.

V - Une réflexion au niveau régional, englobant l’ensemble du Sahel 


Alors que le Mali a été le principal centre d'attention au cours des 12 derniers mois, bon nombre des problèmes que ce pays rencontre sont similaires au Sahel dans son ensemble. La variabilité des précipitations et l'instabilité climatique, la propagation du trafic de stupéfiants, le développement des mouvements djihadistes, et la pauvreté croissante sont des éléments communs du contexte qui conditionnent les perspectives des populations rurales et urbaines. Dans le même temps, la plupart des difficultés auxquelles est confronté le Mali en tant qu'Etat-Nation nécessite le soutien des pays voisins, étant donné son immensité et la difficulté de contrôle de ses frontières. Si le Mali peut profiter pleinement de la présence du fleuve Niger, par exemple, il doit nécessairement coordonner ses investissements dans l'irrigation et l'hydroélectricité avec les Etats riverains. Une approche régionale serait une des clés de l’éradication du commerce des stupéfiants et du contrôle efficace des groupes djihadistes. En tant que pays enclavé, le développement du Mali comme celui du Burkina Faso, le Niger et le Tchad, repose de manière importante sur les investissements en infrastructures réalisés par ses voisins bénéficiant d’une ouverture maritime. Enfin, les menaces liées à l'instabilité ont une incidence sur la région dans son ensemble, de sorte qu'une approche plus large de construction de la résilience au niveau local, national et régional ferait  plus sens.

IIED & IRAM

2 commentaires:

  1. Bravo pour ce blog! Même avec une connexion internet très lente à Kinshasa ce blog marche!
    Di

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  2. Est-ce qu'il est possible d'aborder la question de l'Azawad, des Touaregs? Est-ce politiquement incorrect de parler d'une autonomie à l'écossaise par exemple (avoir un Parlement Touareg permettant de discuter un certain nombre de questions, difficile à déléguer à Bamako)?

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